Lettres de prison de Jaime SERO BERNAT
 fusillé le 23 février 1944 à Eysses

Après la Guerre d'Espagne, Jaime SERO a combattu dans la Résistance d'abord en Normandie puis à Paris où il fut arrêté le 8 avril 1943. Il fut alors emprisonné à la Santé. Condamné par la Section Spéciale de Paris, il fut transféré à la Centrale d'Eysses le 18 décembre 1943.

Notre ami Michel vient de retrouver l'adresse de sa compagne française Gisèle, malheureusement décédée aujourd'hui. De cette union, était née une petite fille, Jacqueline, qui décéda de maladie quelques mois après que son papa fut fusillé. Les grands parents auxquels il s'adresse dans ses lettres sont ceux de sa compagne.


Lettre aux grands parents de Gisèle

Lettre du 13 octobre 1943 aux grands parents

Lettre du 24 octobre 1943 à Gisèle

Lettre du 29 octobre 1943 à Gisèle

Lettre du 10 novembre 1943 à Gisèle

Lettre du 21 novembre 1943 à Gisèle

Lettre du 5 décembre 1943 à Gisèle

Lettre du 7 décembre 1943 à Gisèle

Lettre du 23 décembre 1943 à Gisèle

Lettre du 29 décembre 1943 à Jacqueline

Lettre du 3 janvier 1944 à Gisèle

Lettre du 8 janvier 1944 à Gisèle

Lettre du 14 janvier 1944 à Gisèle

Lettre d'André Féral

Lettre d'André Féral




La Santé

Chers grands parents,

Je vous crois en parfaite santé. La mienne est bonne aussi. Les meilleurs des camarades incarcérés pour des causes semblables, des fils du peuple qui ont le devoir de défendre la liberté, se sont battus pour avoir la possibilité de se réunir avec leurs êtres les plus chers. D’autres la défendent aussi même si ce n’est pas leur terre. C’est ainsi que moi comme espagnol alors que ma patrie souffre des mêmes éléments et des mêmes conséquences, j’attends aussi que le peuple d’Espagne retrouve ses libertés démocratiques.

Tous les jours, j’ai une pensée pour que nos champs soient bien irrigués et que nos terres soient bien nourries, pour que les récoltes soient belles et pour que les fils de la France vivent libres, et nous aussi qui l’avons aidé à devenir libre et indépendante. Les petits marchés de Beaumont et de Le Neubourg retrouveront leur état d’avant-guerre avec toute l’abondance et de riches produits, leur gaieté. Tout ça, nous pouvons en être convaincus quand la guerre sera finie. Bien que nous passerons par des crises assez grandes.

On nous dit que les russes sont à une quarantaine de kilomètres de l’ancienne frontière polonaise. Espérons qu’ils y arrivent bientôt et que dans la suite, les alliés feront ensuite quelque chose sur le continent. Je vous dis encore mille fois merci pour vos envois de cigarettes.

Il parait qu’ils vont regrouper tous les politiques condamnés pour les séparer des autres en attendant un changement définitif dans une Centrale.

Vous pouvez m’écrire jusqu’au moment où je vous écrirai pour vous annoncer mon transfert.

Pour finir, grand-mère et grand-père, recevez mes meilleures pensées




Le 13 octobre 1943

Chers grands parents,

Depuis hier matin, nous sommes installés dans la nouvelle demeure, dans le même service, le service est effectué par la même compagnie. Le régime reste le même avec la seule différence que nous sommes habillés avec le costume et le béret de prisonnier. Nous ne sommes pas beaux avec le fameux costume; nous sommes installés au rez-de-chaussée. La chambre est une merveille. Dans le combat de lutte de libération nationale, on trouve des milliers et des milliers de bons camarades. Je prétends que quelque chose se prépare pour des jours pas lointains et certainement sur le sol de France. Le peuple de France dans cette incontestable lutte sera libre dans son intégrité. Je suis certain qu’aucun français digne de ce nom ne regrettera le maximum des efforts qu’il aura fait pendant cette campagne gigantesque.

Pour vous les meilleures et profondes pensées.

14°division 7°cellule

42 rue de la santé Paris 14°




Le 24 octobre 1943

Ma petite chérie,

Je viens de recevoir ta gentille lettre. Elle m’a fait beaucoup plaisir. Excuse moi de ne pas t’avoir écrit plutôt mais le directeur nous a flanqué trois jours sans pitance pour avoir essayé de faire parvenir des lettres à mon cousin. Je viens de m’adresser aux grands parents. Pour la prochaine récolte de pommes de terre, j’espère pouvoir les aider. Mon camarade me dit qu’il reçu ta lettre cet après-midi. Il me charge de t’adresser ses amitiés ; Tu es certainement au courant des évènements qui se déroulent à l’Est, magnifiques. Mon dieu, le soleil brille sur les toits et parmi ces rayons, Dieu a bien voulu nous en accorder quelques uns.

La mère est malade et la petite a des boutons. Je ne crois pas qu’elle soit mal soignée. L’air du pays catalan ou d’Italie lui ferait du bien Nous fumons comme des pompiers grâce au tabac de ton père. J’admire cette attitude « patriote ».Il parait que les patriotes en font des leurs dans tous les coins de France. Je suis avec de bons camarades comme dans l’autre cellule. Ceux qui sont ici, quelque soit leur religion, sont ici pour quelque chose.

Je t’envoie de forts baisers

Jaime.

Vendredi 29 octobre 1943

 Mon cher ange,

Combien de rêves, bons ou mauvais, ont déjà marqué notre sommeil. La lumière nous est retirée et nous sommes contraints de nous coucher. Cette semaine, je suis le responsable du ravitaillement des quatre. Et nous avons moins de colis. Il faut partager et l’estomac n’est pas content. Quelques semaines avant la fin de la guerre d’Espagne, nous devions résister avec ou sans lentilles.

Que la guerre dure moins de temps ; je veux dire que la victoire aura changé de camp. Je ne veux pas te dire de préparer quelque chose pour Noël. Tout est possible.

Cet après-midi j’ai reçu une lettre du grand père et de la grand-mère. Ils me parlent de ton voyage aux Authieux. Avec la mignonotte comme le dit la grand-mère. On raconte que les camps de Bernay et de Beaumont-le-Roger ont été bombardés cette semaine. Nous avons eu un extrait d’un discours d’Hitler ; c’est vraiment un discours agonique. Je voudrais bien le lire du début à la fin. Aujourd’hui les russes sont à quelques kilomètres d’Odessa. Les forces allemandes de Crimée sont privées de toute fuite possible. Nous savons que les opérations sur le front de l’Est vont à merveille.  Les anglo-américains avancent sur Rome plus lentement. On parle de la prise de Kiev. Si tu as quelque chose de nouveau, fais le moi savoir dans tes lettres. On parle de nouvelles opérations dans de très brefs délais. Tu as fait un voyage à Brunoy. Tu as certainement vu je l’espère Aubrat. Courage et patience

Jaime

13° division 8°cellule

La Santé, le 10 novembre 1943

Chère Gisèle

La petite Jacqueline parle-t-elle l’espagnol ou le français. Evidemment qu’elle apprendra l’espagnol avec ces gens là et le français avec ses petites amies. Plus grande, elle aura certainement la possibilité d’apprendre d’avantage si cela lui plait. Elle doit connaître une quantité considérable de mots en langue castillane. Je pense qu’elle va apprendre très mal avec ces gens là puisqu’ils parlent en langue castillane avec un accent galicien.

C’est toi qui a mis les petits gâteaux dans le colis. Ils étaient délicieux. J’en parle à l’imparfait de l’indicatif. Depuis hier il n’y en a plus.

Aujourd’hui nous avons eu une promenade extraordinaire : coiffeur, visite, la journée passe vite. Certainement que Félix va m’envoyer dimanche des vêtements chauds et une couverture. Depuis dimanche une résistance opiniâtre est engagée concernant le tabac. Selon nous les russes se trouvent à 40 kms de la Lettonie et ont dépassé de quatre vingt kilomètres la ville de Kiev.

En plus nous avons su par les mots du camarade chef de l’URSS que le 2°front n’est pas loin plus. Le discours d’Hitler du 9 novembre fait mention de l’état d’agonie du peuple allemand et de l’armée à l’est.  Et ensuite la Libération. .

Je t’embrasse

Jaime

21 novembre 1943

Ma chère Gisèle,

Te souhaitant un beau dimanche que ça ne t’empêche pas dans Paris d’y trouver une distraction. Il n’a jamais fait une journée aussi fraîche dans la cellule.

Nous sommes gelés. J’ai commencé à mettre les deux paires de chaussettes et des chaussons car les souliers sont trop froids. Ici nous n’avons que la petite paillasse avec laquelle nous couchons par terre. J’ai reçu par une certaine personne des vêtements chauds ainsi qu’une couverture.  Notre cellule est plus noire encore. Nous nous efforçons d’être de bonne humeur mais ce n’est guère possible depuis dimanche nous n’avons pas fumé un seul mégot. Nous organisons la solidarité avec mon camarade Kohn. Est-ce que tu touches des allocations pour la petite. Tu m’expliqueras.

Voilà que le chariot traîne au long du couloir. Ca veut dire que c’est le moment de manger ; Pardon de boire notre soupe.

Je t’embrasse

Jaime

J’ai oublié de te dire que j’ai un rhume qui m’empêche même de parler.

Dimanche 5 décembre 1943

Gisèle,

Je t’espère en bonne santé depuis hier. Je pense au parloir d’hier. Mon dieu, quelle organisation ! Tu pourrais venir le vendredi si le directeur de la prison t’autorise et si tu peux avec ton travail.

Aujourd’hui dimanche on a eu la promenade, que les politiques évidemment. C’est un petit pas en avant. Pour nous et une certaine faiblesse de l’autre côté.  Je crois que nous aurons un quart d’heure en plus. Ce matin j’étais en train de faire ma culture quand le gardien vint nous ouvrir la porte pour aller à la promenade. J’étais en caleçon. Nous nous sommes habillés dans le couloir.

Nous n’avons rien entendu au sujet de l’Espagne. Si les journaux en parlent tu me diras, n’est-ce pas, N’oublies pas la photo de Jacqueline quand tu l’auras.

Me mains sont vraiment glacées, mes pauvres mains. Il y a un moment où je ne peux même pas t‘écrire.

Jaime

La Santé, le 7 décembre 1943

Chère Gisèle,

Je constate après ta lettre que tu es en bonne santé. Nous avons obtenu quelques autres revendications. Après les délégations de nos camarades politiques auprès du directeur qui préfère nous recevoir silencieusement que de nous entendre crier sous ses fenêtres. Il fait un froid terrible dans les cellules et l’humidité coule le long des murs. Mais nous sommes forts car notre courage est inébranlable ; malgré qu’ils voudraient par tous les moyens nous épuiser.

C’est incroyable comme le temps passe vite. Déjà huit mois que je suis en prison et que la petite Jacqueline a maintenant vingt mois. Elle avait un an et un jour exactement le jour de mon arrestation. Le renouvellement du certificat pour la carte de tabac me fut délivré. La peau de mes mains est toute crevée. Jamais je n’ai eu les mains comme ça.

Qu’est-ce que j’ai rêvé la nuit dernière ! C’est incroyable ! j’ai rencontré des personnages dans des lieux lointains Nous vivions au 17°siècle. Je me souviens que les seuls moyens de locomotion étaient les « carrosses ». Pour le moment je te dis au revoir

Jaime

Centrale d’Eysses, le 23 décembre 1943

Ma chère Gisèle,

Je t’espère en bonne santé. Cet après-midi, j’ai reçu une de tes lettres. Comme je te l’avais annoncé le vendredi, notre départ de la Santé fut précipité car nous ne croyions pas à un changement avant la fin janvier. Le directeur nous a annoncé un transfert imminent. Le vendredi vers 9 heures nous sortîmes de nos cellules avec toutes nos affaires. On nous a distribué du pain et un repas de la Croix Rouge pour le voyage. A 7 heures, départ de la Santé dans des voitures cellulaires jusqu’à la gare d’Austerlitz. A sept heures trente, nous montâmes dans les wagons cellulaires. Vers dix heures, départ nos wagons accrochés à l’express Paris-Bordeaux. Nous passâmes par Châteauroux, Poitiers, jusqu’à Bordeaux où nous arrivâmes à six heures du matin. Départ de Bordeaux à 11 heures pour Agen,  puis Villeneuve-sur-Lot vers 21 heures.

Nous fûmes ensuite transportés dans des voitures cellulaires. Maintenant nous avons de l’air. Nous dormons dans des dortoirs. Dans le nôtre nous sommes 66. Ce matin, j’ai été à la visite chez le médecin et je suis hospitalisé depuis cet après-midi. Je t’écris depuis mon lit. Nous avons le droit de recevoir un colis chaque semaine sans limite de poids et plusieurs par semaine. Nous avons aussi le droit de recevoir du linge. Ce qui me manque le plus. Nous avons le droit à un parloir par jour n’importe quel jour. Nous avons le droit théoriquement à une lettre tous les trois jours. A Le Neubourg, tu leur donneras mon adresse. Il nous est interdit de raconter plus que ça par correspondance.

Je t’embrasse bien fort.

Nom Matricule 2699
Détenu politique
Centrale d’Eysses
Villeneuve-sur-Lot
Lot-et-Garonne

Le 29 décembre 1943

Ma Chère Jacqueline,

Bien que tu ne puisses le comprendre par toi-même, ton cher papa, t’adresse loin de toi mais en réalité sa pensée est tout près de toi, les meilleurs vœux de bonheur, de santé et je pense que bientôt je pourrai t’embrasser.

Nouvelle année 1944 ; année de bonheur, de liberté, d’abondance de tout, année où tous les êtres se rejoignent, où tout le monde pourra se retrouver prés de ses êtres les plus chers.

Ton papa qui t’envoie beaucoup de baisers. Bonne année 

Gisèle,

J’espère que tu iras passer le nouvel an avec la petite n’est-ce pas et aussi peut-être chez tes grands parents. J’ai eu une paire de sabots miniatures comme cadeau. Je vais les envoyer dans un colis afin que Jacqueline les garde en souvenir de son jeune papa. 

Du courage et bonne année.

Le 3 janvier 1944

Ma chère Gisèle,

Je viens de recevoir tes deux lettres. Lesquelles m’ont fait grand plaisir. J’avais oublié de te dire que tous ensemble pendant la journée, nous avons l’occasion de bavarder autant qu’il nous plait. Nous ne travaillons pas. Tu comprends ce que cela veut dire. C’est dommage que je ne puisse pas développer certains sujets concernant notre vie ici. Je suis avec mon camarade Kohn. Nous sommes organisés en collectifs. Nous avons mis ensemble tous les colis. Nous avons le droit au tabac. Tu parles de venir me voir. Tu sais ce que cela coûte même si cela me ferait plaisir

Reçois de loin mes meilleures pensées.

Jaime

Le 8 janvier 1944,

J’ai reçu un colis hier avec du tabac et des cigares. Je me demande pourquoi tu m’envoies un colis alors que ta situation ne le permet pas et que les vivres sont chers. J’ai parlé à mon camarade Ignace et convenu que tu cesses de lui envoyer des colis. Nous avons composé des gourbis pour partager les colis et en donner aux « indigents », à ceux qui n’en reçoivent pas ; Nous nous levons à 7heures30. Nous descendons à 8H30. Culture physique et lavabos. Et commence la besogne journalière. La petite Jacqueline a déjà vingt et un mois. Lorsque tu auras une bonne photographie de la petite et une de toi, tu me l’enverras.

Pensant à toi et à Jacqueline, j’attends de recevoir de tes nouvelles bientôt.

Jaime

Au revoir A bientôt !  Auf wiedersen

Le 14 janvier 1944 

Bien estimée Gisèle,

Je viens de recevoir ta lettre et ton colis. Tout est bien arrivé. Je sais que tu as fait de tout ton cœur pour me l’envoyer. Mais je t’avais demandé une cravate et tu m’en as envoyé quatre. Les camarades m’ont demandé si j’allais célébrer mon mariage ou faire commerce de cravates.

Qu’est-ce qu’il fait comme beau soleil ici ! On dirait qu’on est à Barcelone….

A bientôt donc en attendant de tes bonnes nouvelles.

Mille baisers à Jacqueline.

Jaime

André Feral
Pasteur à Castelmoron sur Lot
Lot-et-Garonne

A Mme Gisèle Leroy

7 rue Montalembert Paris VII

Chère madame,

J’ai une bien tragique nouvelle à vous annoncer et mon cœur se serre en songeant à votre peine. Pasteur à Castelmoron, je suis aumônier de la prison centrale d’Eysses où James Sero a été transféré. On est venu me chercher hier matin mercredi 23 février réclamant mon ministère. Je ne comprenais pas. A mon arrivée à la centrale, on m’a dit qu’une émeute à main armée avait éclaté et qu’à cette heure, un certain nombre de détenus étaient jugés par une cour martiale. Onze d’entre eux ont été jugés coupables et condamnés et parmi eux, hélas, était James Sero. Nul des condamnés n’appartenait à la religion protestante. Plusieurs m’ont demandé cependant le service (hélas cruel) de prévenir leur famille.

J’ai assisté à leur dernier moment et cette horrible vision me remplira jusqu’à la fin de tristesse. Tous les condamnés sont morts avec un grand courage. Votre ami m’a prié de vous dire que son souvenir et sa dernière pensée étaient pour vous et pour sa chère fillette. Je vous transmets ce message avec une grande émotion et une infinie tristesse et je demande à Dieu en même temps que sa miséricorde infinie pour celui qui est parti, je lui demande l’apaisement de votre âme meurtrie.

Veuillez agréer madame, ma bien respectueuse sympathie.

A Feral


Le 3 janvier 1945

Chère Madame,

J’ai bien tardé à vous répondre à votre lettre du 1er novembre. Elle m’a pourtant bien fait plaisir. Nous nous sommes connus pendant une période bien tragique. Vous, vous étiez brisée par la catastrophe qui s’était abattue sur votre vie ; moi je sortais à peine d’un deuil qui m’avait anéanti. Et nous portons encore dans notre coeur une blessure que rien ici bas ne peut fermer.

Aussi je comprends bien cet isolement dont vous me parlez dans votre lettre lorsque les alliés sont rentrés dan Paris. Vous étiez heureuse en tant que française de cette délivrance que ceux qui sont tombés désiraient tant.

Vous songiez à celui qui s’est sacrifié pour sa patrie et pour son idéal.

Chère madame, je crois en dieu de toute mon âme et j’ai la ferme conviction que ceux qui ont donné leur vie avec un si entier désintéressement ont été accueillis par dieu et ne sont pas perdus pour nous. Leur corps repose dans le petit cimetière d’Eysses qui a déjà vu bien des pèlerinages de parents et d’amis. A l’endroit même où ils sont tombés, une plaque commémorative a été apposée et est toujours jonchée de fleurs. Mais eux ne sont plus là, il sont plus haut, là où le mal ni la mort ne peut les atteindre. Je vous ai dit sans doute que quelques mois avant leur départ, les allemands ont pénétré à Eysses et ont emmené tous les prisonniers politiques à Penne d’abord. J’ai su qu’ils avaient été conduits d’abord à Fontainebleau et ils doivent les avoir emmenés de là en Allemagne. Pour le moment Eysses est plein de prisonniers politiques d‘une autre espèce (miliciens, collaborateurs, traîtres..) la roue a tourné. Je crois savoir que le directeur qui sur l’ordre de Darnand avait ordonné le massacre du 23 février a payé à son tour comme le lui avait prédit Auzias l’un des condamnés. Au revoir, chère madame, que Dieu vous accorde du courage. Sachez que je pense souvent à vous et que je recevrai toujours avec joie de vos nouvelles.

Mes bons et respectueux souvenirs

A. Feral

Castelmoron/Lot   Let G